Sanseverino @ Les Tanzmatten, Sélestat
On avait laissé Sansévérino l'été dernier à Obernai, lors des Estivales, où il était venu assurer l'une des dernières dates de sa tournée Honky Tonk. L'alchimie qui se dégageait entre les membres du groupe était si évidente alors, si forte, que c'est sans surprise que l'on retrouve ce soir aux Tanzmatten les mêmes acolytes pour accompagner le guitariste-chanteur de Montreuil.
Mais où Sansévérino puise-t’il sa force et son inspiration ? L'homme est un boulimique de travail sans doute, car entre les tournées à rallonges, au cours desquelles il enchaine les dates (il joue 4 fois par semaine au minimum), il trouve à la fois le temps d'enregistrer un nouvel album (Le Petit Bal Perdu) et d'en écrire un nouveau dans son intégralité (Papillon). Vous avez dit efficace ?
C'est donc un mélange de ses deux derniers projets que Sansévérino est venu interpréter ici aux Tanzmatten, et tout naturellement le spectacle s'articule autour de deux parties distinctes.
L'ensemble démarre sur un morceau de Brassens ("Supplique Pour Etre Enterré A La Plage De Sète") qui bien évidemment ne pouvait faire meilleure transition avec Contrebrassens, assurant ce soir la première partie. Ca monte doucement mais sûrement, avec pour le coup quelques emmêlement de mots qui parfois font perdre un peu son sens à la chanson. Mais l'énergie qui s'en dégage efface rapidement ces minuscules erreurs. Viennent ensuite quelques autres reprises, toutes issues du dernier opus (dont "Le Petit Bal Perdu" ainsi qu'un morceau de Pierre Perret), mais on sent que l'esprit est ailleurs et que cet album de reprise n'était en fait qu'une parenthèse que l'artiste semble vouloir mettre de côté au plus vite. Aussi après environ 6 chansons, Sansévérino décrète que ça l'emmerde de chanter les chansons des autres et que finalement il préfère les siennes !
On a bien sûr, passage obligé, droit à quelques clichés sur les élections, le FN et l'Alsace, les curés pédophiles... Bref tout ce qui fait la saveur et, finalement, l'une des marques de fabrique du chanteur depuis quelques années. Mais l'épisode est finalement assez court et, après quelques morceaux du répertoire plus ancien du guitariste, on entre dans la seconde phase du concert qui se voudra beaucoup plus pesante et bien moins encline aux traditionnelles interruptions politicomiques.
En fait Sansévérino a replongé dans l'histoire du bagne et de Cayenne, à travers l’œuvre d'Henri Charrière, "Papillon", et magistralement interprété quelques décennies plus tôt par Steve McQueen dans le film de Franklin D Schaffner. Passionné par l'histoire, Sansévérino a décidé de la ré-interpréter à sa façon au travers de douze nouvelles chansons qui relatent l'histoire du bagnard dans l'ordre chronologique. Et dès les premiers accords on est bien évidemment plongé dans l'univers des grilles, du bateau, des rats...puis des chaines, des cellules, des coups fumants, de l'évasion et de la cavale. Le rythme entêtant des bagnards marchant enchainés, le soleil brûlant... Tout ceci allie l'aventure et quelques sujets qui trouvent grâce aux yeux de son auteur, comme l'erreur judiciaire, la république toute puissante, la corruption. On se laisse bien prendre au jus, d'autant que les musiciens sont concentrés et l'atmosphère un peu lourde parfois. Les rythmes se font moins endiablés, bien qu'on se frotte encore parfois au banjo et à la country. Mais la configuration reste la même qu'au cours de la seconde tournée, avec des musiciens réunis autour de deux micros et changeant de position pour moduler le son des instruments.
Un excellente soirée en définitive, juste ternie légèrement par quelques olibrius alcoolisés venus chercher des noises et pogoter sur les rythmes lents des bagnards ! C'est vrai que c'est un concert, mais peut-être qu'on avait raté quelque chose là.....!!!
Line up:
Jean-Marc Delon : banjo, guitare, voix
Christian Séguret : mandoline, voix
Christophe Cravero : violon, batterie, voix
Jidé Jouannic : contrebasse, voix
Sanseverino : guitare, chant