Festival Solidays - Hippodrome de Longchamp, 7-8-9 juillet 2006

Créé en 1999 pour récolter des fonds destinés à venir en aide aux malades du SIDA, le festival Solidays, qui se déroule chaque année sur le site prestigieux de l’hippodrome de Longchamp, à l’ouest de Paris, est malheureusement devenu une institution au même titre que le Téléthon ou le rendez-vous des Restos du Coeur. Malheureusement, car seule la fin du festival signifiera sans doute l’éradication du virus, ce qui n’est pas encore tout à fait à l’ordre du jour !

En attendant, ce sont près de 800 bénévoles qui oeuvrent sur trois jours pour que les quelques 200 artistes venus soutenir l’action de Solidarité-SIDA puissent donner leurs concerts dans les meilleures conditions possibles. Un grand rendez-vous de solidarité un peu brouillé par un message peu explicite que les artistes cherchent tant bien que mal à faire passer (1 euro/mois pendant un an pour offrir un traitement à une personne atteinte en Afrique), et surtout par un amalgame de diverses causes aux liens parfois distants avec bon nombre de raccourcis assez limites voire utopiques. N’en reste pas moins que Solidays est un grand festival qui, outre des têtes d’affiches destinées à attirer le public en nombre (Jean-Louis Aubert, Bénabar, Raphaël), présente un versant indé non négligeable.


Vendredi 7 juillet 

Côté indé, l’ouverture du festival est assurée par les Californiens de We Are Scientists dont le premier album « With Love and Squalor » est dans les bacs depuis quelques mois. Le trio énergique rencontre un bon succès et l’adhésion du public grâce à des compos d’excellente facture, accrocheuses et puissantes, qui lorgnent largement du côté de l’Angleterre pour l’inspiration. Le relais est ensuite pris par The Zutons qui investissent l’immense scène en extérieur du festival. Mené de main de maître par un chanteur/guitariste de talent, et surtout par une saxophoniste complètement déjantée, le combo de Liverpool délivre une pop teintée de jazz et de soul/funk, avec un seul mot d’ordre : let it groove !
Pourtant décidé ensuite à entendre les élucubrations de Thiéfaine, c’est un véritable déluge qui s’abat sur le festival, obligeant à un repli stratégique à l’abri du Phénix dans lequel officient les abominables Keane. Vite, vite, dès le retour d’un rayon de soleil, on se rend au concert de Kill The Young, dont on est forcé de constater l’incroyable énergie sur scène, avec des titres hargneux et une paire basse/batterie survitaminée. Dès les premières notes du tubesque « Origine Of Illness », une hystérie s’empare du public et l’on en voit qui commencent - mais la chose devient une habitude dans les concerts de rock - à slammer et à pogoter.
Juste le temps de faire retomber le rythme cardiaque à une valeur proche de la normale et déjà les belges de dEUS investissent l’aire de jeu, opposant à la fougue et à la bestialité des KTY une sorte de « sagesse » et des compositions léchées, intelligentes, construites pour aller chatouiller les glandes à plaisir avec une infime délicatesse. Pas tout à fait du même acabit qu’Aston Villa, dont les compositions se suivent et se ressemblent, jusqu’à l’ennui qui survient assez rapidement.

Samedi 8 juillet

La journée commence en extérieur sur la grande scène avec le groupe rochelais Asyl, qui a un peu de mal à obtenir l’adhésion du public. Il faut reconnaître à leur décharge que l’heure avancée du concert (c’est presque encore le matin pour la majorité des festivaliers !), la chaleur et la taille démesurée de la scène pour un groupe de cette envergure sont peut-être la cause de cette apathie’ A l’inverse, c’est à l’ombre du grand chapiteau que les anglais d’Infadels distribuent par salves leur rock’n roll mâtiné d’électro-punk, le noir de leurs costumes contrastant avec le rose flashy de leurs amplis et de leurs synthés. C’est plein de punch et assez entrainant, si bien que le Phénix se voit rapidement transformé en dance-floor…
Thomas Fersen assure quant à lui une prestation élégante, poétique, forte avec cette voix éraillée si caractéristique et cet univers qui n’appartient qu’à lui, où « Zaza » pue toujours autant mais demeure toujours aussi sympa ! Chapeau melon vissé sur la tête façon Orange Mécanique, on se laisse bercer par ces mélodies bien foutues et ces textes ciselés, et le bonhomme trace son chemin doucement mais sûrement pour nous offrir au final une heure de succession de petits bonheurs.
On croise aussi les Têtes Raides qui assènent leurs textes résolument engagés sur la grande scène du festival et, avec l’horloge qui tourne, on voit arriver de grosses pointures rock comme les Dandy Warhols qui vont réaliser un show absolument mémorable. Courtney Taylor-Taylor et Zia McCabe, devenus de véritables stars depuis l’explosion du film « Dig ! », balancent un rock puissant dans lequel sont explorées toutes les possibilités offertes par la combinaison de trois accords ! Ca prend au plus profond des tripes, et ça raisonne encore dans la caboche longtemps après la fin du concert !
Autre grosse pointure, Archive fait une prestation honnête mais qui semble finalement assez longue et terne, la majorité des titres joués étant issus de leur dernier opus « Lights », qui n’a pas le charisme et l’inventivité de leurs premiers disques. Dommage. Enfin, habitués des festivals, ce sont les Dionysos qui se proposent d’enflammer la grande scène devant un parterre sans doute un peu conquis d’avance à la prestation électrique et survoltée de Mathias et de ses comparses. Mais c’est toujours aussi efficace et, que l’on aime ou pas, un concert de Dionysos reste un grand moment à vivre !

Dimanche 9 juillet 

Dernier jour de festival, où la programmation indé se fait plus discrète pour laisser la place à de grosses têtes d’affiches mais aussi et de manière assez discutable au football (finale de la coupe du monde oblige), avec un arrêt des concerts pendant le match. Solidaires face à la maladie ou solidaires derrière Zizou et ses coéquipiers, le choix a été assez rapidement effectué par les organisateurs, qui ont préféré décaler tous les concerts prévus le soir de deux heures ‘
On a quand même pu au cours de cette journée apprécier la fougue des Hushpuppies, eux aussi soumis à un horaire peu propice pour le rock’n roll (14h30). Néanmoins, les Perpignanais exécutent un bon set et il en faut plus pour empêcher Olivier, le chanteur, d’escalader les barrières et de s’offrir un bon slam en fin de concert.
On pouvait ensuite continuer à se délasser les jambes en allant goûter à l’irrésistible funk de Maceo Parker, toujours tiré à quatre épingles malgré une chaleur étouffante, puis se diriger vers le spectacle de l’extravagant Katerine pour un show à la mesure du personnage. Accompagné d’ex-Little Rabbits en talons-aiguilles, sous-pull rose et short vert, l’homme déballe ses histoires abracadabrantesques (tomber sur Marine Le Pen au coin d’une rue !) sur un beat enivrant, collier de fleurs autour du cou. Humour si décalé qu’on ne sait s’il doit être pris au 2nd ou au 33ème degré, et arrangements idéaux pour danser font de sa prestation un incontournable du moment. Enfin, avant la coupure foot, on jette une oreille sur la musique d’El Presidente, sans être franchement conquis tant elle semble fade.
Au bilan une bonne édition servie par une organisation désormais bien rodée, sans temps mort entre les concerts et souvent un son excellent. En revanche, on ressent un excès de solidarité souvent un brin forcée, de nombreux amalgames entre diverses bonnes causes, et surtout on regrette le choix pour le moins discutable de la retransmission sur écrans géants du match marqué par le coup de boule du Marseillais le plus populaire de France…

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